Pour prolonger les essais menés par Martin L et Alexandre Patte de Jabiru France, Contrails ! a rassemblé avec Marc Béranger, quelques données supplémentaires sur le graissage du Jabiru 4 cylindres à poussoirs hydrauliques.
Pour améliorer la lubrification du haut-moteur, Marc a adopté une approche particulière.
N.B. Il ne s'agit pas ici d'une recommandation officielle de Jabiru, mais des investigations personnelles d'un propriétaire privé de moteur Jabiru 2200.
Grâce aux essais de Martin et d'Alexandre Patte, nous avons vu que l'arrivée d'huile aux culasses est limitée sur les Jabiru, par une restriction au départ du bloc moteur.
L'huile se fraie un passage autour du bouchon restricteur, pour ensuite pénétrer dans les tubes menant aux culasses via une gorge percée d'un trou.
Comme on peut le voir ci-contre, il est possible d'améliorer le débit en perçant directement le restricteur.
En effet la fuite entre le bouchon restricteur et son alésage doit correspondre à des tolérances très précises.
Pour assurer un graissage suffisant des culasses, la fuite à la périphérie du restricteur devrait être équivalente à un perçage de 0,5 mm de diamètre, soit une section de 0,196 mm².
Répartie sur la périphérie d'un bouchon de 11 mm, cela équivaut à un jeu diamétral de 5,7 µm, ou moins de 6 microns !
Inutile de dire qu'un tel ajustage ne s'obtient que par un appariement précis, et des essais de débit au montage.
Il parait beaucoup plus simple - et plus précis - d'assurer le débit directement par perçage.
Pour maîtriser le débit, Marc a choisi de tourner de nouveaux restricteurs sans fuite périphérique ni gorge, dans lesquels le débit d'huile se fera exclusivement au travers du gicleur axial.
Ces restricteurs en laiton sont brasés directement sur les tubes d'huile, comme les pièces d'origine.
Pour mesurer le débit par les orifices calibrés, les restricteurs ont été fixés à l'extrémité d'un tuyau de contenance connue, et gradué.
Il s'agit de chronométrer le débit d'une quantité connue d'huile sous une pression d'air comprimé à 4 bar, équivalente à la pression du circuit du moteur.
Avant chaque essai, l'huile Total Aero DM est chauffée au bain-marie, pour assurer une fluidité proche de la réalité.
La température effective est d'une quarantaine de degrés, correspondant à la température de l'huile après quelques minutes de chauffe du moteur.
La photo ne montre pas les volutes de "fumée" s'échappant de la casserole...
Pour chaque diamètre d'orifice, nous avons mesuré le temps d'écoulement sous une pression de 4 bar, et calculé le débit en cm³/min
On peut comparer le chronométrage électronique avec le compte à haute voix de l'opérateur, dont la précision est tout à fait honorable (mettre le son).
La baisse du niveau (en noir) dans le tuyau gradué est clairement visible.
Pour ne pas multiplier les perçages dans les restricteurs, nous avons mesuré les débits pour 3 diamètres.
Diamètre (mm) | Débit (cm³/s) | Débit (cm³/min) |
---|---|---|
0,5 | 0,68 | 41 |
0,6 | 0,89 | 53 |
0,8 | 3,20 | 192 |
Le débit apparaît approximativement proportionnel au carré du diamètre de perçage, donc à la section de l'orifice.
Pour le débit dans une culasse individuelle, diviser ces valeurs par deux.
Marc a réalisé un jeu complet de cache-culbuteurs en plastique, avec les plexis collés à la cyanoacrylate.
Étanches lors des premiers essais, ils ont ensuite été percés et munis d'un tube de mise à l'air libre.
À l'arrêt les logements de culbuteurs avant et arrière contiennent des traces d'huile.
Dans la configuration d'origine, nous constatons qu'au démarrage, il faut plusieurs minutes pour voir arriver l'huile dans les culasses avant.
Sur cette machine à train classique, les culasses arrière sont toujours mieux alimentées que les culasses avant au sol..
Bien qu'on observe de l'huile dans les logements de culbuteurs arrière, les quantité nous semblent réduites.
Lors des tests avec différents diamètres de gicleurs, l'absence de mise à l'air libre a semblé entraîner des perturbations dans la répartition et l'évacuation de l'huile.
Interprétation : la section de retour au carter étant limitée (voir plus loin), l'équilibrage des pressions d'air entre carter et haut-moteur ne peut se faire quand l'huile occupe tout le passage.
La recherche du meilleur compromis s'est poursuivie avec les mises à l'air libre ouvertes.
Le débit d'huile vers les culasses est limité par deux considérations :
- La pression d'huile dans le circuit principal ne doit pas être affectée.
- Le retour de l'huile vers le carter inférieur doit être de bonne section, en raison du volume supérieur de l'huile émulsionnée, et de l'écoulement sans pression.
Nous avons donc fait un test avec un perçage de 0,8 mm de diamètre dans l'un des restricteurs d'origine.
Comme prévu, le débit restant raisonnable, la pression d'huile n'est pas modifiée.
Toutefois les passages de retour d'huile ne sont pas suffisamment dimensionnés, et les culasses se remplissent quelques secondes après le démarrage.
L'orifice d'arrivée d'huile doit donc rester nettement en-deça de cette valeur limite.
Malgré le manque de netteté, on constate que les culasses se remplissent en une vingtaine de secondes.
Ici seule la culasse avant est mise à l'air libre, d'où la relative stagnation dans la culasse arrière où l'air reste emprisonné.
Cela donne à penser qu'au lieu de larges canaux usinés, le retour au carter s'effectuerait par les fuites autour des poussoirs au bas des tubes-enveloppes.
Compte-tenu du diamètre limite du gicleur, le perçage à 0,5 mm nous a semblé un bon compromis : débit nettement plus sympathique qu'à l'origine, tout en restant éloigné du débordement des chambres de culbuteurs.
Malgré une prépondérance des culasses arrières, le débit est visible peu après le démarrage dans les quatre culasses.
Noter que les logements de culbuteurs sont mis à l'air libre.
Différents essais entre 1400 et 2400 t/min au sol n'ont pas permis de déceler de variation de pression ou de débit dans les culasses.
Pas de différence notable entre le côté droit et le côté gauche, voir photos ci-contre.
Les observations visuelles ont été accompagnées de valeurs de débit effectif chiffrées.
Les mesures ont été réalisées avec un tube transparent et une éprouvette graduée en cm³.
Elles consistaient à détourner pendant quelques instants l'huile des culasses.
Pas de souci pour la mécanique : la durée d'une mesure, moins de 3 minutes, reste inférieure au temps nécessaire à l'arrivée d'huile aux culasses lors d'un démarrage à froid (plusieurs minutes avec le montage d'origine).
En raison du faible débit, chaque mesure s'effectue en deux temps sans interruption :
- chronométrage du remplissage du tube transparent
- puis chronométrage du temps d'écoulement de 10 cm³ d'huile dans l'éprouvette.
Volume total prélevé à chaque essai : 26 cm³
Huile Total Aero DM, pression 5 bar, température 50 à 60°C, régime 1200 à 2400 tours/min.
(Martin) | Origine | Gicleur 0,5 mm | |
---|---|---|---|
Droit | (8,4) | 4,7 | 18,9 |
Gauche | (8,4) | 4,8 | 18,6 |
Entre parenthèses, les débits du moteur de Martin avant modification |
On peut constater que sur le moteur de Marc examiné ici (30 h depuis neuf), le débit d'origine représente à peine 57 % du débit initial du moteur de Martin.
Il apparaît que l'orifice de 0,5 mm finalement choisi, multiplie par 4 (390 %) le débit d'origine tout en évitant les problèmes de trop-plein.
Marc a procédé à quelques vols d'essais, en laissant ouvertes les mises à l'air libre des logements de culbuteurs.
- Huile : 80-100°C
- Culasses : 140-160°C